Pierre Claver Zeng, éternel enfin
L'association des étudiants gabonais du Nord de la France a écrit à son membre Ricky. Elle lui présente ses condoléances, auxquelles tous s'associent, à l'occasion du départ de son père, Pierre Claver Zeng Ebome.
Inestimable, vivant, inestimable après, inestimable à jamais.
Qu’on me laisse pleurer
seulement ce soir et les prochains soirs
je ne voudrais pas les compter
cela m’importe peu
qu’on me laisse rouler ma stupeur le long
du Sentier sans fin que je vais entamer
ce soir et tous les soirs prochains
qu’on me laisse pleurer sans parler
sans crier sans savoir pourquoi
le terrain qui porte le poids de
mon corps qui n’est plus que pleurs
devient meuble à mesure que je lui
pleure dessus
C’est que le temps cette fois encore
se penche sur mon œil puis lui
vole une couleur rare, la chromie la plus
fière de mon monde celle que me donnait
le poète chaque fois que j'apposais sur ma langue
son chant du perdreau percussion du tronc d’essi
le temps avance sans m’avertir jamais des tisons
dans mon ventre comme si je me nourrissais toujours
des brûlures et de ces feux à ma masure
Je commence pourtant à manquer de vigueur
des forces qui me restent bien peu daignent encore
escorter les douleurs que je recueille à tout bout d' escale
dans une trouée de forêt où m’attend la vision sage
et acérée d’un ami qui pour moi n'a qu’un mot un sourire
une écuelle et la poignée de main franche avant que l’attente
la patience ne prennent le relais pour mon grand étonnement
Qu’on me laisse pleurer ce soir comme je le souhaite
et jusque très tard dans la vie si tel mon honneur est
car ma mémoire elle aussi consent à reconnaître
la loi millénaire à laquelle mes mains et même
leurs tremblements colère acceptent de se soumettre
désormais je voudrais veiller moi aussi mille saisons
et ma descendance entière le chantonnement discret
délicat de ma sylve natale que lui seul lui seul
le barde l'humble grillon libéra
Ada Bessomo